PICTOCALENDRIER

18 novembre 2019

PICTOLIEU

Le Star

Woman at war

Benedikt Erlingsson

Synopsis

Halla, la cinquantaine, déclare la guerre à l’industrie locale de l’aluminium, qui défigure son pays. Elle prend tous les risques pour protéger les Hautes Terres d’Islande… Mais la situation pourrait changer avec l’arrivée inattendue d’une petite orpheline dans sa vie…

Note d’intention

Benedikt Erlingsson présente Woman at War : « Ce film vise à être un conte héroïque se déroulant dans notre monde où la menace est imminente. Un conte héroïque à la manière d’un récit d’aventure. Un conte de fée sérieux mais raconté avec le sourire. Notre héroïne est une Artémis moderne, protectrice des contrées vierges et du monde sauvage. Seule, confrontée à une planète qui change rapidement, elle endosse le rôle de sauveur de la terre mère et des générations futures. Notre point de vue est très proche de celui de notre héroïne, voilà pourquoi nous accédons à sa vie intérieure. […] C’est un film sur une femme qui s’efforce d’être quelqu’un. »

Dompter la nature

À l’instar de son précédent et premier long métrage Des chevaux et des hommesBenedikt Erlingsson met en scène dans Woman at War des personnages qui tentent, en vain, de dominer la nature : « Il est clair pour moi que les droits de la nature doivent être considérés au même niveau que les droits de l’homme, et c’est effectivement une idée qui imprègne les deux films. […] les droits de la nature doivent être défendus par des lois nationales, inscrites dans toutes les constitutions, et par des lois internationales. »

Trouver Halla

Le réalisateur a choisi Halldòra Geirhardsdòttir pour incarner Halla, le rôle principal de son film. Tous les deux se connaissent depuis l’enfance et ont collaboré plusieurs fois au théâtre. Geirhardsdòttir est une artiste très populaire en Islande : actrice, musicienne et metteur en scène, elle mène une carrière à succès tant sur scène, qu’à la télévision et au cinéma. Benedikt Erlingsson dit à son propos : « On pourrait qualifier Halldóra de Sarah Bernhardt d’Islande – si Sarah Bernhardt pouvait soutenir la comparaison ! » 

Un prénom connoté

Halla, le prénom de l’héroïne de Woman at War, est répandu en Islande et chargé de références historiques et culturelles. Halla et Eyvindur sont les derniers bandits de l‘histoire islandaise, ils sont célèbres pour avoir survécu plus de 20 ans en se cachant dans les Hautes Terres au XVIIème siècle. Ils étaient de vrais montagnards, voleurs de moutons et rebelles, de nombreuses histoires ont raconté leurs exploits et leur lutte. Il y a un peu plus de cent ans, le poète et dramaturge islandais Jóhann Sigurjónsson a écrit une pièce sur eux, Eyvind de la montagne (Fjalla-Eyvind). Elle a été jouée avec succès dans divers pays. En 1918, Victor Sjöström a réalisé Les Proscrits en s’inspirant de cette légende.

Un film protéiforme

Woman at War peut à la fois être décrit comme un drame, un thriller écologiste et une comédie. Mais le réalisateur se défend d’avoir réfléchi à un genre précis lors de l’écriture du film : « Mon coscénariste Ólafur Egill Egillsson et moi n’avons jamais sérieusement parlé du genre du film. Nos discussions qui s’en rapprochaient le plus portaient sur les mots… conte, par exemple. C’est un mot intéressant, qui, en outre, a été très utile à l’élaboration du récit. Pour moi, il s’agit bien d’avantage de chercher l’histoire, la mission, la souffrance ou toute notion abstraite qui vont rendre le projet et l’histoire excitants. Nous sommes tous les deux férus de dramaturgie, l’essence même de toutes les bonnes histoires. Je ne considère pas ce film comme une comédie ; je ne fais pas de comédie ou au moins je ne cherche pas à en faire. S’il y a quelque chose de drôle dans le genre d’histoire que je raconte, ça vient en supplément, comme un effet additionnel. En termes de procédé, je vais toujours directement vers ce qui fait mal. Je cherche la douleur de l’auteur ou du personnage et ce qu’elle signifie. »

Le choeur

Woman at War a la particularité de montrer à l’écran les musiciens alors qu’ils jouent la bande originale du film. Pour le réalisateur, ils sont comparables à un choeur grec qui s’adresse autant à l’héroïne qu’au public, soulignant par un morceau les décisions importantes. Cette mise en scène permet également un effet de distanciation : « Ce concept a été attribué à Bertolt Brecht mais il remonte loin dans l’histoire du théâtre et du spectacle. On pourrait dire qu’à chaque fois qu’un musicien joue à l’écran, c’est le réalisateur qui met des guillemets à la séquence, nous rappelle que nous sommes dans une fiction et que derrière ce simulacre il y a un message ou une conclusion que devra saisir le spectateur en s’appuyant sur ce qu’il voit. A travers ce dispositif, je veux arriver à un accord avec le spectateur à propos du type de film dont il s’agit et des lois qu’il respecte. C’est un conte de héros, dans un monde saturé de conte de héros qui sauvent le monde. J’appartiens à ces spectateurs qui pourraient peut-être avoir besoin d’un coup de pouce original pour accepter de s’en remettre à ce genre de conte. »